sale journée [libre]

Angie entra dans le bar et s'assit au comtoir en poussant un long soupir.
"Joe! Sers-moi... une vodka s'il te plaît!"
Angie se prit la tête entre les mains et leva juste les yeux pour remercier Joe lorsqu'il lui posa son verre devant elle.
Elle en avait marre. Elle avait passé une mauvaise journée. Très mauvaise. L'un des patients dont elle s'occupait avait fait un arrêt respiratoire dans sa chambre après son opération. Il était maintenant dans un état incertain. Son épouse avait piqué une crise de nerf. Elle avait ravagé la moitié du couloir. Et puis le petit garçon qu'elle passait voir tous les jours pour sa toilette était décédé. Une leucémie. Elle avait vu la famille en larmes. C'était affreux.
Et puis ça lui avait rappelé la sienne, de famille. En Australie. Elle ne les avait plus vus depuis des mois. Oh, bien sûr, si elle était ici, c'était pour réaliser son rêve de gosse. Elle ne regrettait rien. Mais... dans ce genre de moments, dans une telle journée, on a besoin d'avoir quelqu'un qui soit attentif à vous, qui vous aime, à qui on puisse se confier. Et ici, aux Etats-Unis, Angie n'avait personne. Oui, elle connaissait du monde. Mais c'était tout. Une connaissance, ce n'est pas un proche.
Alors voilà, elle allait se contenter de sa vodka. Une vodka pour la réconforter... au fond, ça n'est peut-etre pas si mal. C'est docile. Ca ne vous laisse pas tomber pour un rien. Pas comme Josh, parti pour une autre fille. Pfouh. Finalement, elle était très bien ici. Juste un peu seule, mais très bien.
*Très bien?! Comme si c'était être très bien que déprimer dans un bar! Ca ne te ressemble pas, Angie! Tu n'es pas quelqu'un de si... ennyeux et ennuyé. Faut te ressaisir!*
songea-t-elle en finissant sa vodka. Oooooops, déjà fini sa vodka... c'était trop bon!
"Allez Joe, une deuxième s'il te plait!"

Pour ne pas changer, Paul avait terminé à pas d'heure. Il fallait à tout prix qu'il recrute de nouveau radiologues. La situation ne pouvait plus durer. Il allait se tuer à la tâche et si auparavant, ne pas avoir de vie sociale ne l'embêtait plus outre mesure, aujourd'hui c'était différent. Il poussa un soupir de soulagement lorsqu'il éteignit son ordinateur puis la lumière de son bureau en le fermant à clef. Il allait en parler avec le conseil d'administration. Il allait faire ça. Dès qu'il aurait le temps. Et surtout dès qu'il aurait passé une bonne nuit de sommeil mérité. Il s'imaginait déjà en train de poser la tête sur son merveilleux oreiller tout en douceur. Alors qu'il se rendit sur le parking, il se figea en voyant une voiture mal garée devant sa voiture. Là c'était trop! Il rentra dans l'hôpital pour demander qu'on la déplace illico presto mais visiblement elle n'était à personne. Il sortit et lança un regard noir sur le bar de Joe. Il pénétra à l'intérieur d'un pas rageur et requéra l'attention de tous, bien peu de noctambules en vérité, en levant les mains au ciel et en hurlant par dessus la musique rock du juke-box :

"Oh, hé!! Le propriétaire de la Ford Mondéo sur le parking pourrait la déplacer!"

Il se tut attendant un mouvement et rajouta sur le même ton :

"Et ce n'est pas une question."

Il attendit quelques minutes mais rien. Laissant ses bras retomber de chacun de ses côtés, il alla s'installer au bar, posant sa tête sur celui-ci et commanda une bière à Joe d'un ton désespéré. Ce n'était pas maintenant qu'il allait pouvoir poser sa tête sur son oreiller.